Mares en micro-réseau et gain écologique

Les mares, définition

Les mares représentent des systèmes complexes étroitement liés aux activités humaines et forment une interface entre les milieux aquatiques et terrestres à l’origine d’une grande biodiversité.

Elles se caractérisent comme des pièces d’eau stagnantes généralement inférieures à 5000 m² (avec un maximum d’1 hectare) et de profondeur d’eau inférieure à 2 m pouvant être temporaires (asséchée en période estivale) (Sajaloli & Dutilleul, 2001).

Partie intégrante des zones humides, les mares abritent une très grande diversité biologique en plus des amphibiens et apparaissent essentielles dans l’équilibre des cycles de l’eau et du carbone. Or, plus de 50% de la surface des zones humides en France ont été perdues entre les années 60 et 90 (Bernard, 1994). De même, une diminution du nombre de mares est observée depuis ces dernières décennies, touchant particulièrement les petits milieux (Oertli & Frossard, 2013). Ainsi, la préservation de ces milieux sensibles et fragiles représente un enjeu important pour la conservation de la biodiversité qu’ils accueillent.

Mares en réseau dans le Trièves

Construire des réseaux de mares

D’après la communauté scientifique, les naturalistes et notamment l’association FNE (2020), un réseau fonctionnel de mares se caractérise par la présence minimale de 4 mares/km², soit des mares espacées de maximum 500m. Dans le cadre des programmes de création et de restauration de mares qu’elles portent, la LPO de l’Isère a réalisé plus de 160 mares depuis 2019.

Essayant au maximum de travailler sur des emplacements de mares favorisant la connectivité des milieux et le maintien de réseaux de mares, la LPO a constaté que cette tâche est très complexe voire impossible sur les territoires fortement peuplés et anthropisés comme c’est le cas des vallées iséroises (nombre de villes et de routes important).

De plus, d’autres aspects s’opposent à la création de vastes réseaux de mares comme les autorisations foncières à obtenir mais aussi les larges cours d’eau rectifiés et les pratiques agricoles intensives. La LPO AuRA a ainsi expérimenté la réalisation de mares très proches géographiquement afin de tester la pertinence de micro-réseaux de mares pour la sauvegarde des amphibiens. Ainsi un micro-réseau est défini comme étant un minimum de mares séparé de maximum 400 m, correspondant à la dispersion moyenne pour 44% des amphibiens, et sans aucun obstacle à la migration des amphibiens.

Figure 1 : Schéma de définition des mares isolées, des réseaux fonctionnels de mares et des micro-réseaux de mares développés

Figure 2 : Comparaison de la richesse spécifique maximale entre : a) les mares comprises dans un réseau et les mares isolées, b) les mares d’un réseau créé et les mares d’un réseau ayant une mare existante avant la création de mares complémentaires.
Test statistique de Wilcoxon

Résultats et analyse

Sur les 160 mares, 49 mares suivies ont été utilisées pour étudier la différence entre des mares en micro-réseau et des mares dîtes isolées. Les premiers résultats de cette étude sont très encourageants. En effet, il a été mis en évidence que la richesse spécifique observée dans les mares est significativement plus élevée dans les mares en micro-réseau que dans les mares isolées, avec en moyenne deux fois plus d’espèces (4 espèces contre 2 espèces en moyenne).

En outre, les formations en micro-réseau permettent de garantir la connectivité entre les milieux, notamment en favorisant le brassage génétique entre les métapopulations présentes dans les mares.

Par ailleurs, plus les mares et les réseaux sont grands, plus leur capacité d’accueil est élevée, due à la diversité de micro-habitats qu’ils confèrent, créant de nombreuses niches écologiques (Brown & Lomolino, 1996) et permettant également de garder une diversité génétique élevée (Frankham et al., 1999). Cela permet d’améliorer la stabilité et la résilience des amphibiens à des petites échelles. En effet, les micro-réseaux peuvent également être très intéressants d’un point de vue de gestion puisque lorsqu’il faut intervenir sur une mare, il reste toujours au moins une mare fonctionnelle qui peut servir de refuge pour les espèces dérangées le temps de l’intervention.

Ainsi, ces résultats ont permis de démontrer la pertinence de créer des mares en réseau dont la connectivité biologique fonctionnelle entre les habitats favorise la diversité des amphibiens. Cette étude sera poursuivie et amplifiée dans les mois et années à venir pour mieux évaluer l’importance de travailler sur des micro-réseaux et comprendre leur fonctionnement en termes de répartition des espèces au sein des mares de micro-réseaux.

Mares en réseau de Flachères